La région Franche-Comté est historiquement très industrielle. Il n’existe pas de grand territoire vide même si les établissements d’importance se concentrent plutôt dans les villes. Les industries traditionnelles concernent autant la transformation des produits agricoles que les productions métallurgiques, horlogères, lunettières, automobiles
La densité du réseau hydrographique et sa capacité à alimenter les établissements en énergie ont favorisé les premières implantations, notamment dans le Haut-Jura. L’évolution des activités industrielles leur a permis de perdurer et de prospérer au XXème siècle.
Dès les années 30, les industriels ont été à l’initiative de commandes innovantes et choisissent des projets d’allure moderne qui affichent une image de progrès.
Certaines activités, ayant des contraintes particulières, nécessitent des réponses architecturales appropriées que les techniques de constructions nouvelles permettent.
La technique de construction en métal et/ou en béton armé permet les plateaux libres de points porteurs, les larges baies vitrées indispensables aux activités de précision – lunetterie et horlogerie – qui requièrent beaucoup de lumière et privilégient l’éclairage naturel.
Les activités industrielles se caractérisent au XXème siècle, par deux bouleversements :
Il peut imposer, pour la production, soit une marche en avant tout au long de la transformation du produit, soit une décomposition de la production dans divers ateliers et un assemblage final avant expédition.
La conception des bâtiments illustre cette rationalisation, notamment dans la programmation de chalets-modèles pour la fabrication du comté.
Illustr. Le Fied (39), fruitière à comté
Généralement, les activités administratives et de production occupent le même site mais sont distincts.
Illustr. Morbier (39), usine | Illustr. Saint-Claude (39), centre d'exploitation EDF |
Les premières implantations sont conditionnées à la proximité de la ressource énergétique assurée par le réseau hydraulique. Le développement de l’énergie électrique permet aux activités de s’éloigner des cours d’eau et de s’implanter plus librement à proximité des voies d’accès et des quartiers d’habitation.
Illustr. Morbier (39), vue aérienne
Les bâtiments s’implantent en périphérie immédiate des noyaux anciens des villages et sont mêlés aux fonctions résidentielles et commerciales.
Illustr. Morbier (39), ancienne usine Bourgeois | Illustr. Champagnole (39), imprimerie Gresset |
Dans les villes, la proximité de la gare est un atout et conditionne l’installation d’activités dans ces quartiers. Ces bâtiments sont désormais intégrés aux villes et villages suite au développement de l’urbanisme et cette situation peut être une contrainte en termes de bruits, d’accès et de possibilité de développement.
Illustr. Vaux-les-Saint-Claude (39), vue aérienne
Comme ce fut le cas pour les salines nationales de Lons le Saunier / Montmorot, certaines activités industrielles occupant à l’origine des sites aussi vastes que la ville elle-même (cf carte d’état-major 1820 – 1866) déclinent puis s’arrêtent. La ville, se développe et d’autres activités s’implantent.
Illustr. Carte d'état-major Lons Le Saunier / Montmorot (39)
Ici les Archives départementales construites en 1977, étendues en 2001, côtoient le porche d’entrée des salines rescapé des démolitions.
Illustr. Porche anciennes Salines
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Illustr. Archives départementales du Jura - Montmorot (39) Bâtiment initial (1977) et extension (2001 C. Schouwey arch.) |
La notion de zonage et de spécialisation de l’espace se développe dans les années 50, ce qui a pour conséquence de concentrer les activités dans des zones industrielles et/ou artisanales monofonctionnelles, extérieures à la ville.
Illustr. Saint-Claude (39), vue aérienne | Illustr. Champagnole (39), vue aérienne |
Les bâtiments de production se caractérisent par des surfaces libres et décloisonnées que les techniques de construction autorisent. La hauteur des ateliers dépend directement de la production.
Illustr. Poligny (39), fromagerie BRUN
Illustr. Morbier (39), usine | Illustr. Saint-Lupicin (39), usine |
Les zones de bureaux restent cloisonnées et leur organisation reflète à la fois la hiérarchie et la fonction, dans un service : comptabilité, approvisionnement, expédition, etc.
C’est généralement dans la zone d’accueil du public que le traitement de l’espace est le plus soigné :
escalier, volumes à double hauteur, notion d’atrium, de puits de lumière, etc.
Selon les époques, les bâtiments administratifs sont dissociés ou associés à la production.
Illustr. de gauche : Morbier (39) :
ancienne usine Bourgeois (aujourd'hui Girod Médias)
Illustr. Saint-Lupicin (39), usine |
Les bâtiments administratifs à portée symbolique s’organisent parfois autour de vastes espaces de représentation ayant pour fonctions aussi bien l’accueil du public,
des manifestations diverses ainsi que la desserte interne des étages.
L’atrium du Conseil Départemental du Jura, couvert d’une verrière, apporte également la lumière zénithale au cœur de l’établissement.
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Illustr. Lons-le-Saunier (39), Conseil Départemental du Jura : vues intérieures de l'espace central |
L’apport de lumière naturelle est un enjeu dans l’ensemble des bâtiments
Une bonne répartition de la lumière assure un meilleur confort, permet un travail plus soigné et une économie notable d’énergie.
Illustr. Morbier (39), ancienne usine
Deux dispositifs assurent l’éclairement des volumes :
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Illustr. Lons le Saunier (39), ancienne imprimerie Moderne |
Illustr. Corravillers (70), ancienne usine de tissage de coton
La salle de lecture des archives départementales est conçue comme un volume simple, dont le pourtour est entièrement meublé de rayonnages en bois.
De hautes baies vitrées permettent un abondant éclairage naturel, mais jamais de pénétration des rayons du soleil.
Illustr. Archives du Jura - Montmorot (39) Salle de lecture
L’ornementation est directement liée à l’époque et au style de la construction.
Généralement, elle recourt à des techniques et matériaux industriels (céramiques, briques, métal, etc.) et se concentre sur les façades et les espaces orientées vers la ville et le public et dans les locaux administratifs : porche et hall d’entrée, salle de réunion, bureau …
Illustr. 1 Saint-Lupicin (39), usine Bourbon, entrée | ||||||
Illustr. 2 Lons le Saunier (39), ancienne imprimerie Moderne, détail façade, ancienne dénomination | ||||||
Illustr. 3 et 4 Champagnole (39), imprimerie Gresset, détail façade entrée et ancienne dénomination |
L’ornement extérieur a plusieurs fonctions : il atténue la rudesse d’un lieu de travail aux formes géométriques en apportant de la fantaisie et des éléments un peu précieux. Il constitue un signe de richesse et a une fonction d’enseigne en annonçant la raison sociale : l’activité, le nom de l’industriel, etc.
L’horloge monumentale, installée à l’entrée de l’usine est un élément permanent.
Illustr. Poligny (39), fromagerie Brun, horloge
A partir des années 30, l’ornementation disparait au profit d’une expression plastique de l’architecture avec la mise en scène d’un élément particulier : porche d’entrée, escalier monumental, fronton.
Illustr. Morbier (39), janv 2017 CAUE39 :
ancienne usine Bourgeois (aujourd'hui Girod Médias)
Dans les ateliers de production, l’objectif principal est de libérer les surfaces de travail de points porteurs et d’aménager des plateaux de travail décloisonnés.
Les matériaux industriels qui permettent d’assurer une construction rapide et économique et qui offrent des performances techniques ont très vite été mis en œuvre dans la construction de ces bâtiments :
la brique et les poutrelles métalliques dès le début du siècle, le béton armé dès les années 30.
Illustr.1 Saint-Lupicin (39), usine Bourbon |
Illustr. 2 Morbier (39), usine Girod Médias (anciennement Bourgeois)
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Les structures métalliques sont privilégiées dès les années 60 pour les ateliers les plus vastes, notamment les usines de construction automobile.
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Illustr. de haut en bas et de gauche à droite : Illustr. 1 Lons le Saunier (39) : Conseil départemental détail toiture auvent Illustr. 2 Morbier (39) : Usine Diager (ancienne usine Guex) Illustr. 3 Saint-Claude (39) : Centre d'exploitation EDF Illustr. 4 Saint-Lupicin (39) : Usine Bourbon |
Les bétons « architectoniques » permettent d’accrocher la lumière et d’animer les façades par leurs teintes et surtout leurs textures variées (cannelées, sablées, grenaillées, polies, etc.) obtenues par traitement des fonds de moules des panneaux de béton préfabriqués et traitements de surface, ou ajout de matrices dans les banches de coffrage des éléments coulés sur place.
Illustr. 1 et 2 Archives départementales du Jura - Montmorot (39)
Bâtiment intial de 1977
Les façades entièrement vitrées qui se développent dans les années 80’ et 90’ s’accompagnent d’éléments brise-soleil métalliques afin de maîtriser les phénomènes de surchauffe des locaux
Illustr. 3 et 4 Conseil départemental du Jura - Lons le Saunier (39) - Façade Ouest, profil et détail brise-soleil - Architectes : ARCHI-TECTURE 1994
La situation des bâtiments du début du siècle, leurs qualités techniques et leurs caractéristiques en termes de volumes et de lumière sont des atouts en faveur de leur évolution et leur transformation en locaux destinés à accueillir des activités de services et résidentielles, dans le cadre d’une politique de renouvellement urbain ou d’activités artisanales et culturelles.
Illustr. Lons le Saunier (39), ancienne imprimerie Moderne, reconvertie en logements et bureaux
Illustr. Morbier (39), ancienne usine Bourgeois, aujourd'hui Girod Médias : rénovation énergétique et transformation en bureaux |
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